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Lions de l'Atlas: le 3-5-2, une fausse bonne idée?
02/06/2022 - 22:00
Nassim El KerfDepuis son arrivée à la tête des Lions de l’Atlas en août 2019, "Coach Vahid" n’avait jamais connu une défaite par trois buts d’écart. Face aux Etats-Unis en amical, Vahid Halilhodzic n’imaginait sans doute pas un tel score (3-0), mais face à un adversaire aussi bien organisé, la moindre erreur se paye cher.
Une première d’autant plus inquiétante, puisque elle survient à quelques jours de l’entame des éliminatoires de la Coupe d’Afrique des Nations 2023 (CAN) face à l’Afrique du Sud le 9 juin prochain à Rabat, et à moins de six mois du coup d’envoi de la Coupe du Monde au Qatar.
Une première à tout
Première lourde défaite pour Halilhodzic à la tête des Lions, mais surtout première défaite de l’équipe nationale face aux Etats-Unis, en cinq confrontations. Il fallait attendre 2022 pour que la TeamUSA parvienne à prendre le dessus sur les Lions de l’Atlas, après un match nul (0-0) aux Jeux Olympiques de Munich en 1972 et trois défaites en matchs amicaux (1992, 1999 et 2006).
Mal menés d’entrée de jeu, les hommes de Vahid Halilhodzic ont timidement réagi aux assauts des Américains, et pour la première fois depuis l’arrivée du nouveau staff technique en 2019, on a vu une équipe nationale dépassée physiquement, alors que c’est l’un des points forts de cette version des Lions de l’Atlas.
Le pressing des Yanks a fait sortir les Marocains de leur zone de confort, les obligeant à jouer de longs ballons pour éviter les pertes de balles. Le rythme imposé par l’adversaire a également fait flancher les Lions, qui étaient loin d’imaginer que la Team USA allait mettre toutes les chances de son côté pour enfin battre le Maroc, qui plus est, en fin de saison.
"Nous avions du mal à sortir le ballon comme on le voulait, on a trouvé notre rythme petit à petit, mais nous n’avons pas pu marquer et faire la différence devant", a déclaré Yassine Bounou, à l’issue de la rencontre. Le portier des Lions de l’Atlas tout fraîchement couronné meilleur gardien de la Liga (Zamora), a été héroïque, malgré trois buts encaissés, il réalisera plusieurs arrêts décisifs pour limiter les dégâts.
Des ambitions et des vieux démons
D’après ses discours en conférence de presse, Vahid Halilhodzic espère faire du Maroc la surprise du Mondial 2022. Sans pour autant promettre un ticket pour le deuxième tour, le technicien a souvent relevé que ses joueurs ont bien leur carte à jouer au sein du groupe F, avec la Belgique, la Croatie et le Canada.
Justement, c’est pour préparer la confrontation contre le Canada (3e et dernier match de la phase de poule) que le choix du «sparring partner» pour cette date FIFA, s’est porté sur les Etats-Unis. Ce match a finalement confirmé toutes les lacunes, que les Lions de l’Atlas ont déjà laissé transparaître à Kinshasa, lors du match barrage pour le Mondial en mars dernier face à la République démocratique du Congo.
"C’est la fin de saison, les joueurs ne sont pas tous en très bonne forme physique. Le score ne reflète pas le match, nous avons eu plusieurs occasions pour marquer mais nous n’avons pas été réalistes", a martelé Vahid en déclaration d’après match, et en conférence de presse. Pourtant, son équipe n’a pas été flamboyante, loin de là.
Le sélectionneur a une nouvelle fois opté pour le 5-3-2 qui se transforme en 3-5-2 en phase offensive, avec Achraf Hakimi et Adam Masina dans les couloirs, Samy Mmae avec Nayef Aguerd et Romain Saïss, un milieu de terrain en triangle inversé composé d’Adel Taarabt, Azeddine Ounahi et Sofyan Amrabat seul devant la défense et Ayoub El Kaabi et Tarik Tissoudali en attaque. Exception faite pour Taarabt qui a été préféré à Salim Amellah, c’est la même équipe alignée lors de la victoire contre la RDC à Casablanca en mars dernier (4-1).
Le 3-5-2, est-ce vraiment une bonne idée?
La formation a montré déjà beaucoup de limites à Kinshasa où les Lions sont passés proches de la défaite (1-1), mais qui, décidemment, plaît au sélectionneur. Sauf que pour être efficace avec ce genre de dispositifs, il faut que tous les joueurs soient au meilleur de leurs niveaux, que le système soit bien huilé et que les automatismes fonctionnent. Face aux Etats-Unis, la machine a carrément déraillé.
Achraf Hakimi, moins inspiré que d’habitude en attaque a laissé quelques espaces aux adversaires en défense, avant de causer un penalty à l’heure de jeu après une faute sur Pulisic. Dans le couloir gauche, Adam Masina a lui aussi rendu une pâle copie, par son placement et ses ballons perdus, malgré deux occasions qu’il a pu créer en attaque.
Au milieu de terrain, la formule en triangle inversé avec une sentinelle devant la défense ne rend pas justice aux efforts de Sofyan Amrabat. Premier à aller au duel pour la récupération, il a été souvent «abandonné» par ses coéquipiers au moment de saisir le deuxième ballon ou de combiner pour aller vers l’avant. Un mauvais placement de Taarabt ou Ounahi, et tout s’écroule. Comme sur le deuxième but encaissé par les Lions, sur la frappe de Tim Weah, le joueur de Lille. Le fils de la légende vivante George Weah a eu tout le temps de recevoir le ballon, se retourner et armer sa frappe, sans le moindre pressing, pour tromper Bounou.
La paire Tissoudali-El Kaabi, quant à elle, semble bien fonctionner. Les deux joueurs s’entendent bien sur le terrain, et parviennent à se créer des espaces, et beaucoup d’occasions. Bien épaulés par un ailier capable de faire la différence en un contre un comme Amine Harit ou encore Soufiane Rahimi qui ont signé de belles entrées à la 70e minute de jeu, le duo d’attaque peut faire des merveilles. Dans un système avec quatre défenseurs, avec plus de densité au milieu de terrain comme durant le parcours sans faute des éliminatoires du Mondial, la machine tourne mieux, et les chiffres le prouvent.
Le 3-5-2 de Coach Vahid a encore montré ses limites. Même si offensivement, les Lions parviennent à se créer des occasions, défensivement, c’est plus compliqué. Face à une équipe aussi bien organisée que les Etats-Unis, 15e nation au classement FIFA, les petites erreurs sont vite devenues grandes. Contrairement au match de Kinshasa, où les attaquants adverses étaient moins inspirés pour profiter des erreurs de l’équipe nationale.
La Coupe du Monde commence certes dans plus de cinq mois, et le sélectionneur aura tout le temps de faire les retouches nécessaires. Mais les éliminatoires de la CAN, débutent dans moins d’une semaine (9 juin), et l’entame sera face à l’Afrique du Sud. Un adversaire qui historiquement, ne fait aucun cadeau aux Lions de l’Atlas (6 matchs, 1 victoire, 2 défaites et 3 nuls). L’équipe nationale a encore du pain sur la planche !
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