Politique
Ukraine: les enjeux géopolitiques d'une crise
17/02/2022 - 19:28
Lina WafyLes deux voisins ont beaucoup en commun, et pourtant, ils accumulent les tensions qui remontent à plus loin que la fin de la guerre froide. L’afflux des troupes russes à la frontière ravive les souvenirs amers de 2014.
Une démonstration de force, qui une nouvelle fois fait craindre l’escalade. Occident s’en mêle, et personne ne reculera, car tous les moyens sont -pas- bons, et surtout radicaux. Un vrai jeu de pouvoir qui risque de virer au désastre, car "la Russie ne veut pas que l'Ukraine soit intégrée à l’OTAN pour ne pas être encerclée par l'Occident", a expliqué Jawad Kerdoudi, président de l’Institut marocain des relations internationales.
À la frontière stratégique de l’ancien empire des Tsars se trouve cette "petite Russie", comme l'ont appelée la plupart des empires qui l'ont occupée au cours des siècles, et qui constitue aujourd’hui la troisième puissance nucléaire mondiale en nombres d'ogives. L’Ukraine ouvre bien l’appétit des chasseurs occidentaux, et en particulier celle de l’OTAN.
Cette alliance, créée en 1949 pour faire face à la menace soviétique, n’a pas disparu avec la chute de l’URSS et n’a pas cessé de s’agrandir en intégrant une grande majorité des anciens pays socialiste. La force de l’OTAN est bien dans sa résilience, avec comme politique "l’union fait la force". Disposer d’une base militaire à la frontière de la Russie, est donc indispensable.
D’ailleurs, c’est dans ce cadre qu’il faut comprendre l’ampleur de l’aide militaire qu’ont fourni les États Unis à l'Ukraine et qui a été évalué à non moins que 2,5 milliards de dollars. Ce qui justifie clairement le développement des forces militaires ukrainiennes qui sont passées de 6.000 soldats en 2014 à 150.000 aujourd’hui, selon une étude du service de recherche du Congrès américain. En 1997, Zbigniew Brzezinski, l’un des plus influents stratèges américains, écrivait que la collaboration de l’OTAN avec l’Ukraine "pourrait devenir la colonne vertébrale géostratégique de l'Europe".
Mais, le président russe compte bien faire barrière close à ces stratégies de domination militaire, géostratégique et économique. La Russie, qui est la deuxième puissance militaire dans le monde (hors nucléaire), tient à maintenir son influence sur les anciens membres de l’Union soviétique, tout en conservant un rôle international dominant. "On constate une résurgence de la guerre froide du fait que Poutine veut redonner à la Russie une place prépondérante sur la scène internationale. De son côté l'Occident ( États-Unis et Europe ) veut affaiblir la Russie à travers l'OTAN qui a déjà intégré 12 pays satellites de l'Ex-URSS. L'Occident veut intégrer également l'Ukraine pour encercler la Russie", comme le souligne Jawad Kerdoudi.
Depuis octobre dernier, les rumeurs ne cessent de planer sur un éventuel scénario de guerre. Dans un communiqué, le ministère russe a déclaré que les Occidentaux tentaient de détourner l’attention de leurs propres actions agressives. Le pays a également reproché aux médias occidentaux de répandre de fausses informations suggérant que Moscow préparerait une invasion de l’Ukraine. De son côté, l’expert en relations internationales Jawad Kerdoudi semble rassuré: "Je ne pense pas que la Russie va envahir l'Ukraine, car le coût serait très élevé pour elle".
Peu de temps avant cela, en décembre dernier, le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, a dénoncé la "menace directe" que représente l'Ukraine, ajoutant que "si l'Occident n'est pas capable de dissuader l'Ukraine, mais s'il essaye au contraire de l'encourager, alors nous prendrons toutes les mesures nécessaires pour assurer notre sécurité".
Les pays concernés par ce conflit font partie des plus grandes puissances nucléaires. "Cedant arma togae" (céder les armes) est une nécessité afin de sortir "ne quid detrimenti" (sans aucun dommage) de ce conflit et éviter le pire: la guerre.
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