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Elon Musk, la "fusée" électorale de l'extrême droite allemande
16/02/2025 - 09:19
AFP
Le visage tout sourire du plus célèbre des conseillers de Donald Trump envahit le grand écran du congrès de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) à Halle, sous les vivats des délégués qui agitent des ballons en forme de coeur.
Bras levés, Elon Musk les appelle à être "fiers d'être Allemands", à laisser le poids du passé derrière eux et lance à la foule: "Vous êtes le meilleur espoir de l'Allemagne".
Le parti d'extrême droite allemand, seule formation du pays à avoir été conviée à l'investiture du nouveau président américain, jubile. Il a trouvé dans le patron de Space X une rampe de lancement très efficace pour sa campagne en vue des élections législatives du 23 février dans le pays.
Le milliardaire agit de concert avec le vice-président américain JD Vance, qui a profité de la Conférence sur la Sécurité de Munich vendredi pour exhorter la droite classique allemande à faire tomber le "mur pare-feu" par lequel elle s'interdit de gouverner avec l'AfD.
S'il a "snobé" à Munich le chancelier Olaf Scholz, JD Vance a réservé un entretien en tête-à-tête à la cheffe de file de l'AfD, Alice Weidel.
Cette dernière bénéficie sur X du poids du patron-même de la plateforme, Elon Musk: débat en duo et messages de soutien répétés pour marteler que "seule l'AfD peut sauver l'Allemagne".
Celui que Donald Trump a chargé de faire le ménage dans l'administration américaine, vilipende les dirigeants sociaux-démocrates, tel le chancelier Olaf Scholz, qualifié d'"idiot incompétent", ou le chef de l'Etat Frank-Walter Steinmeier, vu comme un "tyran antidémocratique".
Les saillies d'Elon Musk s'inscrivent dans une stratégie bien huilée d'ingérence visant plusieurs dirigeants centristes ou de gauche en Europe, dont le Premier ministre britannique, Keir Starmer, fait aussi les frais. Et elle semble porter ses fruits. Les derniers sondages donne l'AfD à plus de 20% - deux fois plus que son score du scrutin de 2021.
"C'est bien qu'il nous recommande comme la seule solution", dit à l'AFP Kristin Brinker, une des dirigeantes du parti à Berlin, "car cela nous aide à gagner en normalité" dans l'opinion.
"Si l'homme le plus riche du monde, également proche de Trump, dit que l'AfD c'est OK et qu'on peut travailler avec elle, on ne peut pas rêver mieux", ajoute-t-elle.
Oubliées les critiques sévères qu'exprimait le mouvement d'extrême droite voici quelques années contre l'implantation en 2022 de la première "gigafactory" européenne de production de voitures électriques de Tesla au sud de Berlin.
A l'époque, le mouvement, peu porté sur les technologies "vertes" et idéologiquement pro-russe, voyait d'un mauvais oeil l'arrivée en force sur ses terres de ce milliardaire américain.
Aujourd'hui l'homme d'affaires à succès confère une légitimité économique à un mouvement qui peine encore à convaincre dans ce domaine, notamment auprès des cadres et entreprises.
Les soutiens d'Elon Musk constituent "une sorte d'anoblissement" pour l'AfD, dit à l'AFP le politologue Wolfgang Schroeder, un des meilleurs connaisseurs du parti, pour qui cette "intervention d'une puissance étrangère dans nos élections nationales (...) est du jamais vu dans l'histoire de la République fédérale" allemande.
Avec Elon Musk, "l'AfD n'aurait pu imaginer un meilleur militant dans ses rangs", lui fait écho l'expert en communication politique Johannes Hillj dans le Spiegel.
Créé à l'origine en 2013 par des professeurs d'université sur un programme anti-euro, le mouvement s'est radicalisé au fil des ans autour d'un mono-programme anti-migrants et nationaliste. Très implanté dans les territoires correspondants jusqu'en 1990 à l'Allemagne de l'Est communiste, il est traversé d'un fort courant identitaire, autour de Björn Höcke, souvent accusé de révisionnisme.
Cela lui vaut d'être dans le collimateur des Renseignements généraux. Les propos d'Elon Musk portant aux nues lors du congrès de Halle la nation allemande "millénaire", ou citant l'empereur romain Jules César "impressionné" en son temps par la combativité des tribus germaniques, sont du miel pour les cadres du parti.
Dans son échange en duo sur X, Alice Weidel est allée jusqu'à lancer à Elon Musk qu'Adolf Hitler était en réalité "un communiste".

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