Economie
Gaz butane: 9,9 MMDH seraient-ils suffisants pour couvrir la charge de compensation ?
30/10/2021 - 14:30
Lina IbrizLe PLF 2022 a consacré un montant de 9,9 MMDH destiné à subventionner les prix du gaz butane. Néanmoins, alors que les cours mondiaux du gaz butane continuent à grimper, le montant réservé dans le cadre du PLF 2022 sera-t-il suffisant pour couvrir la charge de compensation du gaz butane ?
Au cours des premiers huit mois de 2021, la charge de compensation s’est établie à 12,7 MMDH en hausse de 31,7%, alors que le cours moyen du gaz butane s’est apprécié de 58,6% à 563 dollars la tonne, relève Bank Al-Maghrib dans son rapport sur la politique monétaire sorti ce mois-ci. Cette tendance haussière des cours du gaz butane s’est poursuivie jusqu’en octobre où la cotation mensuelle du butane a enregistré, en octobre, une nette hausse de 19,55% pour se situer aujourd’hui à 795 dollars/tonne.
Alors que le gouvernement a basé ses prévisions de dépenses de subvention du prix du gaz butane sur un prix moyen de 571 dollars/tonne, les cours mondiaux affichent une tendance haussière durant les mois à venir. "Les cours mondiaux ont fortement augmenté. En automne et en hiver, les pays industriels consomment énormément de gaz pour la production d’électricité et pour le chauffage. Alors que la demande augmente, les cours mondiaux du gaz butane auront tendance à augmenter à leur tour", explique à SNRTnews le fiscaliste et professeur à l’ISCAE, Mohamed Rahj.
En subventionnant le gaz butane, l’Etat s’engage à payer aux sociétés gazières la différence entre le coût de revient de l’importation et les prix fixés par l’État de manière mensuelle. Outre le paiement de ce différentiel, l’Etat devra également supporter les charges du transport. "Parallèlement, sur le plan international, on constate un fort renchérissement des frais de transport. Pour certains containers, le prix est passé de 2.000 dollars à 10.000 dollars. Au renchérissement de la matière première qui est le gaz s’ajoute le renchérissement du transport. Donc on subit la hausse du prix à deux niveaux", indique l’universitaire.
Vu les évolutions des cours mondiaux, "le montant qui est prévu initialement pour la subvention du gaz de butane probablement ne serait probablement pas suffisant pour couvrir la charge de compensation", estime l’expert. Le gaz butane fait partie des gaz du pétrole liquéfiés les plus consommés au Maroc, et la quasi-totalité de la consommation nationale est importée. Ainsi, le gouvernement marocain sera condamné à s’adapter aux nouveaux prix du marché international.
Quelles solutions possibles ?
"Le gouvernement est dans l’obligation d’honorer ses engagements en consacrant toutes les sommes nécessaires à la subvention du gaz butane au Maroc. C’est un produit sensible sur le plan économique comme sur le plan social", affirme Rahj. Si le prix du gaz butane continue à grimper à l’échelle internationale, l’Exécutif sera amené à ajuster son budget afin de couvrir les dépenses de soutien du prix du gaz. "Dans ce cas, il y a une possibilité qui est prévue par la loi organique des finances et par les finances publiques de revoir à la hausse cette dépense d’ici le 31 décembre, à moindre de prendre une décision politique et élaborer une loi comme l’avait fait l’ex-chef du gouvernement Benkirane sur la suppression de la subvention des produits pétroliers".
Cependant, la suppression de la subvention reste un scénario improbable. "Je ne pense pas que le gouvernement va faillir à ses engagements, d’autant plus qu’il s’agit d’un produit à forte consommation sociale", explique le professeur. Et d’ajouter: "Je ne pense pas qu’il serait prêt à courir le risque de voir des millions de Marocains sortir dans la rue".
Par conséquent, le gouvernement devra choisir entre deux solutions, selon Rahj: "Soit le montant consacré au soutien du gaz va rester inchangé, ce qui va creuser davantage le déficit budgétaire, soit il y aura une réaffectation des dépenses publiques, en affectant une partie des dépenses publiques, qui ne seraient pas engagées, à la subvention du gaz".
Dans tous les cas, en attendant qu’une politique de ciblage soit instauré et que le registre social unifié devienne opérationnel, "c’est une charge qui va être supportée par l’Etat. Politiquement, elle est justifiable, tant qu’on n’aura pas trouvé d’alternatifs", conclut le fiscaliste.
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