Economie
Huile de table : les dessous de la pénurie des oléagineux
26/02/2021 - 20:04
SNRTnewsLa récente flambée des prix de l’huile de table au Maroc a soulevé le problème de la culture et de la commercialisation des oléagineux au Maroc. Pourtant, l’État et les professionnels du secteur ont conclu, il y a sept ans, un contrat-programme afin d'augmenter la capacité de production de ces cultures.
«La faible production d'oléagineux au Maroc est essentiellement due au manque d'intérêt des agriculteurs pour ce type de céréales, dont le rendement nécessite des pluies abondantes», estime Rachid Benali, président de la Fédération interprofessionnelle Marocaine de l'Olive (INTERPROLIVE) et vice-président de la Confédération Marocaine de l'Agriculture et du Développement Rural (COMADER) dans une déclaration à SNRTnews. Pour ce professionnel du secteur, «ce type d'agriculture a connu au Maroc au cours des dernières années un déclin significatif, notamment au niveau de la région du Gharb».
«Malgré les différentes initiatives mises en place par le ministère de l'Agriculture, dans le cadre du Plan Maroc Vert, afin d’inciter les agriculteurs à cultiver des oléagineux, en incitant les entreprises à acquérir leurs produits, notamment le tournesol, à un prix de 500 dirhams le quintal, les agriculteurs ne se tournent pas vers ce type d'agriculture, qui, de leur point de vue, nécessite des conditions particulières, comme l'abondance des pluies», explique Rachid Benali.
Lors de l’édition 2013 du Salon International de l'Agriculture au Maroc (SIAM), le gouvernement ainsi que la Fédération interprofessionnelle des oléagineux (FOLEA) ont conclu un accord portant sur la mise en place d’un programme pour relancer le secteur des oléagineux (2013 – 2020). Une enveloppe de 421 millions de dirhams, lui, a alors été allouée.
Cet accord fixait plusieurs objectifs, notamment l’extension ainsi que la diversification des superficies dédiées aux oléagineux pour atteindre 127.000 hectares, dont 85 mille hectares de tournesols et 42.000 hectares de graines de colza. Ce même accord visait également l’amélioration du rendement à une moyenne de 18 quintaux par hectare pour le tournesol et 20 quintaux par hectare pour le colza. Ce programme signé en 2013 avait également pour objectif l'augmentation de la production d'huile comestible pour atteindre 93.000 tonnes en 2020, en plus de porter le taux de couverture des besoins de production nationale à 19%.
De son côté, Larbi Zagdouni, économiste et chercheur en développement rural, a déclaré à SNRTnews que «la faible production marocaine d'oléagineux est due aux politiques adoptées par l'État sur cette base, qui accordent plus d'importance à l'irrigation qu’à la culture en bour». Et d’ajouter, «en observant la production agricole marocaine au cours des dernières années, nous constatons que le Maroc a atteint l'autosuffisance au niveau des produits laitiers, des viandes, des légumes, des fruits et 50 % du sucre, face à une pénurie des cultures en bour qui comprennent les oléagineux». «Cette situation, dit-il, oblige le Maroc à recourir à l'importation de graines oléagineuses, ce qui le met à la merci du marché international, qui a récemment connu une hausse exponentielle de ces produits». À cet égard, COMADER a déclaré que le Maroc importe du marché international la quasi-totalité des matières premières nécessaires à la production des huiles, notamment le soja et le tournesol, dont les prix viennent d’augmenter.
L’huile de soja brute est passé de 600 dollars la tonne soit plus de 80% d’augmentation alors que le prix du tournesol est passé de 750 dollars à 1435 dollars soit plus de 90% d’augmentation. «La hausse des cours de l’huile de soja s’explique par le retard accumulé de la récolte des graines de soja en Amérique du sud conjugué à la mauvaises conditions climatiques dans ses pays. Ce retard est estimé à 6 millions de tonnes», affirmait l'association dans un communiqué. Et ce n'est pas tout puisque «les chinois continuent d’acheter massivement pour constituer les stocks et driver les prix à la hausse». Il y a aussi le faible bilan de la récolte de tournesol 2020/2021 qui enregistre un net recul de production de 5 millions de tonnes (-12% de production). Les pays importateurs ont accentué leur rythme d’importations ces derniers mois afin, eux aussi, de constituer un stock de sécurité. Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), les prix des huiles végétales ont augmenté de 5,8% en janvier, par rapport à décembre, une augmentation des plus élevées en huit ans.
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