Société
Journée mondiale de l'handicap: attentes et état des lieux
05/12/2021 - 12:35
Khaoula BenhaddouComme chaque année, le 3 décembre est une occasion pour rendre hommage aux personnes en situation de handicap, de les accompagner et de mettre en lumière les problèmes auxquels ils font face.
Les réalisations pour commencer
Depuis quelques années, le Royaume s’est inscrit dans une démarche inclusive des personnes en situation de handicap. Ministères, associations et ONG se sont mobilisés pour améliorer la situation de cette frange de la société.
Dans ce sens, l’Initiative nationale de développement humain (INDH) s’est mobilisée, depuis son lancement en 2005 sur une initiative de SM le Roi Mohammed VI, pour assurer plus de dignité aux personnes à besoins spécifiques, contribuant ainsi à favoriser leur intégration dans la société.
À travers le Programme d’accompagnement des personnes en situation de précarité, l’INDH a ainsi mis en œuvre de nombreux projets de prise en charge des personnes en situation de handicap sans ressources dans des centres spécialisés, répartis sur l’ensemble du territoire national. Les prestations assurées par ces centres ont été sensiblement améliorées afin de correspondre au mieux aux besoins de cette catégorie de la population.
L’INDH a, depuis le début effectif de la troisième phase en 2019, piloté 1.066 projets et actions, et a mis en œuvre un investissement de 462 millions de dirhams qui a bénéficié à plus de 150.000 personnes ces trois dernières années, répartis sur tout le territoire national.
L’essentiel des actions menées a concerné la construction et l’équipement des centres d’accueil spécialisés, l’acquisition de moyens de transport, y compris les ambulances, pour les personnes en situation de handicap, et le fonctionnement ou la mise à niveau des établissements.
Le nouveau modèle de développement a également réservé une grande partie pour la prise en charge et l’accompagnement de cette tranche de la société.
Le gouvernement d’Aziz Akhennouch s’est également engagé durant son mandat 2021-2026 à améliorer la situation des personnes en situation de handicap. L'Exécutif s’engage ainsi à mettre en place une politique publique claire, intégrée et multidimensionnelle en faveur des personnes à besoins spécifiques. Un budget annuel de 500 MDH sera alloué aux ONG actives dans le domaine afin d’offrir, selon un cahier des charges, un ensemble de services à cette frange de la population.
Des efforts "insuffisants"
Pour les militants et experts dans le domaine des Droits des personnes en situation de handicap, beaucoup de choses restent à faire. "On ne peut pas nier les efforts déployés pour l’inclusion des personnes en situation de handicap, mais ce n’est pas suffisant", déplore Lamia Mouhssine psychologue et militante. "Il y a des stratégies pour l’éducation inclusive de ces personnes, mais leur concrétisation laisse à désirer. Les enseignants ne sont pas formés pour s’occuper de ces personnes, et les écoles ne sont pas non plus équipées pour leur assurer une meilleure prise en charge. Il ne suffit pas d’ouvrir les portes de l’école à un enfant en situation de handicap, il faut surtout adapter les programmes, le curriculum, et les activités parascolaires", tonne la psychologue.
Lutter contre les stéréotypes
La militante souligne que les programmes gouvernementaux et le nouveau modèle de développement abordent la situation des personnes en situation de handicap avec une approche caritative. "C’est très bien de vouloir améliorer la situation de ces personnes, mais il faut d’abord éliminer les stéréotypes. Par exemple, dans le nouveau modèle de développement on met ces personnes dans la case de la précarité alors que ce n’est pas souvent le cas. La vision de nos responsables n’a pas vraiment évolué", se lamente la militante.
Elle précise que ces personnes sont surtout des ressources qu’on doit exploiter. "Ce sont des personnes avec des capacités extraordinaires, on doit les impliquer en tant que sources de richesse pour notre pays et ne pas les exclure du marché de l’emploi".
Accessibilité, le sujet qui fâche !
Sur ce point, la psychologue rappelle que beaucoup de choses restent à faire. "Les personnes en situation de handicap souffrent énormément à cause de la question de l’accessibilité. Par exemple, le Maroc a connu dernièrement les élections législatives. Les personnes en situation de handicap n’ont pas souvent pu accéder aux bureaux de vote, non seulement en tant qu’électeur, mais en tant qu’élu sans parler des difficultés d’accéder aux administrations, hôpitaux, et transport public".
À part le côté architectural, la militante souligne d’autres problèmes relatifs à l’accessibilité. "La pandémie a vraiment démontré qu’on ne pense pas à ces personnes. En termes de statistiques, on peut facilement chiffrer le nombre de femmes enceintes, de personnes âgées ou d’enfants qui ont contracté la Covid-19, mais pas les personnes en situation de handicap !", fait-elle remarquer.
Quid du marché de l’emploi ?
Au Maroc, le taux de chômage des personnes en situation de handicap est six fois plus élevé que celui des non-handicapées. 66,1% de ces personnes sont non scolarisées notamment les filles en milieux urbain et rural.
Pour la militante, les personnes en situation de handicap sont souvent exclues du marché de l’emploi. "Avant de travailler, il faut d’abord faire des études. Or, rares sont les personnes en situation de handicap qui réussissent à décrocher leurs diplômes supérieurs. Pour le recrutement, cela ne se fait que dans le secteur public et avec un quota qui ne dépasse même pas les 7%", déplore encore Lamia Mouhssine. Elle demande ainsi aux autorités de revoir les stratégies de prise en charge des personnes en situation de handicap et de les concrétiser sur le terrain.
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