Société
Appels à reconsidérer le décret fixant les prix des médicaments au Maroc
12/01/2024 - 12:28
Ouiam Faraj | Mohammed FizaziLe ministère de la Santé et de la Protection sociale a décidé de réduire les prix d'environ 4500 médicaments originaux, génériques et biosimilaires commercialisés au Maroc. Cette mesure s'accompagne de l'élargissement de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée, qui était fixée à 7 %, pour inclure tous les médicaments et les matières premières entrant dans leur composition, ainsi que les emballages non référencés.
Les spécialistes de la santé estiment que ces mesures ont un impact positif sur les prix des médicaments et ont contribué à réduire une part importante de leur coût. Cependant, ils affirment que ces mesures restent insuffisantes pour permettre aux patients d'accéder à certains médicaments coûteux, en raison des prix élevés fixés par les fabricants.
Un décret nécessitant une mise à jour
Dans ce contexte, Ali Lotfi, président du Réseau marocain pour la défense du droit à la santé et à la vie, a souligné que de nombreuses entreprises pharmaceutiques commercialisent des médicaments à des prix supérieurs à ceux pratiqués dans les pays européens et arabes, notamment les médicaments pour l'hépatite virale B et C, certains médicaments anticancéreux, les médicaments pour le diabète, l'asthme, les maladies cardiovasculaires et les médicaments de fertilité.
Lotfi estime que ces prix imposent des coûts supplémentaires aux patients, aux caisses d'assurance maladie et au trésor public. Il se réfère à un rapport précédent de la Cour des Comptes qui a montré que "les prix des médicaments au Maroc sont supérieurs à ceux pratiqués dans de nombreux pays de 200 à 300 %".
Concernant les principales raisons de la persistance de la hausse des prix des médicaments malgré les mesures gouvernementales, Ali Lotfi a confirmé que cela est dû au décret du 18 décembre 2013 relatif aux conditions et modalités de fixation des prix de vente des médicaments fabriqués localement et importés, soulignant que ce décret a été élaboré en coordination avec les entreprises de fabrication et d'importation de médicaments et nécessite une révision.
Lotfi a expliqué dans une déclaration à SNRTnews que ce décret "a ouvert la voie aux entreprises multinationales pour réaliser des profits exorbitants sous le couvert d'un système qui fixe le prix des médicaments sur la base d'une analyse comparative des prix d'usine hors taxes pratiqués dans les pays sélectionnés pour la comparaison de référence".
Il a poursuivi que la comparaison des prix concerne l'Espagne, le Portugal, la France, la Belgique, la Grèce, la Turquie et l'Arabie Saoudite, "huit pays qui n'ont aucun rapport avec le niveau économique et le revenu national du Maroc".
Dans sa déclaration, Lotfi a confirmé que ce décret sert uniquement les entreprises d'importation de médicaments de l'étranger et va à l'encontre de l'intérêt des citoyens, ce qui a entraîné une augmentation continue des prix de nombreux médicaments malgré la décision gouvernementale d'annuler la taxe sur la valeur ajoutée, empêchant certains citoyens de compléter leur protocole de traitement.
Faible taux de consommation
À son tour, Amin Bouzoubaa, secrétaire général de la Confédération des syndicats des pharmaciens du Maroc, a confirmé que le décret encadrant la réduction des prix des médicaments au Maroc n'a pas fait l'objet d'une évaluation efficace de son efficacité depuis une décennie, notant qu'il n'a pas atteint les objectifs escomptés consistant à faciliter l'accès des citoyens aux médicaments.
Bouzoubaa a expliqué dans une déclaration à SNRTnews que les réductions annoncées de temps à autre par le ministère concernent principalement les médicaments bon marché dont les prix ne dépassent parfois pas 50 ou 20 dirhams, notant qu'ils sont réduits de quelques dirhams seulement et n'ont donc pas d'impact significatif sur le pouvoir d'achat des citoyens.
Bouzoubaa a estimé que "le décret n'a pas réussi à réduire les prix des médicaments coûteux appartenant aux troisième et quatrième catégories selon la classification de ces médicaments selon le décret mentionné", soulignant que ce sont ces médicaments qui pèsent réellement sur les finances des citoyens et des caisses d'assurance.
Il a étayé son point de vue en citant le taux de consommation individuelle de médicaments par an, qui n'a pas dépassé, selon lui, 315 dirhams en 2013, notant que le taux annuel de consommation n'a pas dépassé 500 dirhams par citoyen marocain après dix ans de mise en œuvre du décret.
Bouzoubaa estime que ce taux est toujours faible par rapport à certains pays voisins, où le taux de consommation individuelle de médicaments dépasse 1700 dirhams, "ce qui confirme que les prix des médicaments restent un obstacle à l'accès des citoyens à ces derniers".
Il convient de noter que le dernier numéro du bulletin Officiel n° 7262 a publié une décision du ministère de la Santé et de la Protection sociale modifiant et complétant la décision de révision des prix de vente au public des médicaments originaux, génériques et biosimilaires commercialisés au Maroc. Cette décision inclut une longue liste de nombreux médicaments dont les prix ont été réduits.
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