Société
Bab Sebta, l’insoutenable absence de perspectives
08/02/2021 - 16:56
Khaoula Benhaddou«Même si je ne porte plus des centaines de kilos de marchandises sur le dos, mon fardeau s'est durement alourdi. Depuis la fermeture de Bab Sebta, je ne trouve plus de travail. Ma vie est détruite». Ce témoignage poignant sonne comme un cri de détresse. C'est celui d'une certaine Hanane, dont les paroles ont été filmées par l’association Sayida Al Horra. Comme elle, ce sont des milliers de femmes qui ont vu leur vie basculer après la fermeture de Bab Sebta. Elles effectuaient un boulot pénible et épuisant, à la limite dégradant, mais bossaient. Elles subvenaient aux besoins des leurs. Aujourd'hui, après des mois de fermeture des frontières entre le Maroc et l'Espagne en raison de la crise du Covid, elles n'ont pas encore trouvé d'alternative.
L'association Sayada Al Horra qualifie, dans une étude, les conséquences de la fermeture du passage de Bab Sebta de «graves». Plus de 35% de femmes n’ont pas pu trouver un autre emploi, 43% se sont convertis comme femmes de ménages et 15% se sont lancées dans la vente à la sauvette. L'association alerte également sur les autres effets dévastateurs que cette situation a provoqué. Des femmes, devenues plus vulnérables en raison de leur précarité, se sont retrouvés victimes de violence (53%). Certaines ont même été expulsées de leur logement car elles ne pouvaient pas payer le loyer, s'indigne Zahra Dghoughi, coordinatrice générale de l’association. «Après la fermeture de Bab Sebta, la région du nord s’est transformée en une zone sinistrée. Les femmes porteuses se sont retrouvées dans des conditions précaires. Souvent les maris sont en chômage. Ce sont elles qui prenaient en charge leur famille. Aujourd’hui, plusieurs d’entre elles ont été abandonnés par leur mari». Ces, âgées de plus de 45 ans, n’ont aucun diplôme. Du coup, affirme Mm Dghoughi, personne ne peut les recruter et se trouvent obliger de faire du ménage ou faire la manche».
Depuis quelques jours les responsables de la région affirment avoir multiplié les réunions afin de trouver une issue à cette impasse. Les responsables de la région, les élus locaux et la société civile se disent mobilisés pour trouver des solutions alternatives. Un sit-in a été organisé, vendredi 5 février 2021, pour protester contre cette crise que traverse la petite bourgade du Nord après la fermeture de la frontière de Bab Sebta. Lors de la dispersion du sit-in non autorisé, six policiers ont été blessés et plusieurs manifestants ont du être secourus pour cause d’évanouissement, selon un communiqué de la préfecture de M'diq-Fnideq. La manifestation intervient après la publication, la semaine dernière, d’un manifeste à l’attention du gouvernement dénonçant la situation économique et sociale que vit la ville limitrophe avec la frontière de Bab Sebta.
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