Société
Jaâfar Heikel: "La situation est aujourd'hui stable, elle n’est pas inquiétante"
13/04/2021 - 10:57
Meryem Ait OuaannaDepuis quelques jours, plusieurs professionnels de santé s’accordent à dire que le Maroc est à l’aube d’une troisième vague de coronavirus. Sur les sept derniers jours, 3.538 nouveaux cas ont été répertoriés au niveau national, face à 2.950 une semaine auparavant, soit donc une hausse de 20%. S’agissant du nombre de décès en lien avec la Covid-19, le Maroc a enregistré au cours de la semaine écoulée 52 cas, contre 31 la semaine antérieure. Lundi 12 avril, le ministère de la Santé a fait savoir, dans son bilan épidémiologique quotidien, que le taux d’occupation des lits en réanimation reste assez stable (13,4%) tandis que le taux d’incidence cumulée est de 1381,1%. Face à ces chiffres, peut-on estimer que le Maroc est au début d’une troisième vague de l’épidémie ?
Trois différentes "phases"
Joint par SNRTnews, Jaâfar Heikel, épidémiologiste, professeur de médecine préventive et spécialiste des maladies infectieuses estime qu’il faut plutôt parler d’une troisième phase et non pas une troisième vague. "Quand on parle de vague, ça veut dire qu’il y a un sommet et une chute, puis encore un nouveau sommet, une chute et ainsi de suite. Parler de vague veut également dire que les déterminants qui ont fait que celle-ci a commencé et ceux qui ont fait qu’elle a terminé étaient les mêmes. Or, c’est totalement différent. Parce que la stratégie du gouvernement durant la première phase était différente de celle de la deuxième phase et elle est différente de celle de la troisième phase", a-t-il précisé.
Selon ce scientifique, la dynamique épidémiologique de la Covid-19 au Maroc se décline en trois phases. "La première phase a commencé le 2 mars 2020 jusqu'à fin juin. La deuxième phase sur une période de six mois, de juillet à décembre. Et actuellement, nous sommes dans une troisième et phase avec une nouvelle dynamique épidémiologique, la phase actuelle a commencé en janvier" a-t-il expliqué.
Le variant anglais inquiète
Concernant les cas en hospitalisation suite à la Covid-19, Jaâfar Heikel nous a indiqué sur un ton rassurant que la situation "est encore stable, elle n’est pas inquiétante". Et de poursuivre qu'aujourd'hui "à peu près de 5.000 personnes sont sous surveillance, je vous rappelle que nous étions à presque 50.000 fin novembre. Donc il ne faut quand même relativiser les choses" a-t-il insisté.
Par ailleurs, l’épidémiologiste fait observer que ce qui est plutôt inquiétant au Maroc est "le nombre en augmentation du variant anglais qui circule plus vite et qui se transmet plus rapidement". Le 18 janvier 2021, le ministère de la Santé a annoncé qu’un premier de contamination par le nouveau variant de coronavirus apparu au Royaume-Uni a été décelé au Maroc. Il s’agissait d’un ressortissant marocain en provenance d’Irlande à bord d’un bateau venant de Marseille. Le 5 avril dernier, le ministère a précisé dans un communiqué que le dispositif de veille génomique du SARS-CoV2 a permis la détection de 89 souches B.1.1.7 (variant britannique) réparties sur sept régions du Royaume.
Prudence !
Afin de limiter les conséquences d’une éventuelle propagation du variant anglais au Maroc, Jaâfar Heikel appelle à la prudence et la vigilance. "C’est une situation qui doit nous imposer la prudence parce qu’on risque d’avoir de plus en plus de cas à cause du variant anglais. Ce dernier est maintenant présent de façon plus importante, donc il va circuler auprès de la population jeune, il va circuler auprès des gens qui ne sont pas totalement vaccinés. C’est pour ça qu’il faut faire attention, car il y a un risque de pression sur le système de santé dans les prochaines semaines".
Pour faire faire à cette situation, Jaâfar Heikel insiste sur l’importance du dépistage précoce. "L’accentuation du dépistage a malheureusement diminué. Il est donc nécessaire d’augmenter le nombre de tests, de prendre en charge de façon rapide les patients qui manifestent les premiers symptômes, et de continuer notre stratégie vaccinale qui a très bien commencé". Et d’ajouter : "le principe de prudence et de précaution s’impose, mais il ne faut pas dramatiser la situation. Il faut simplement être prudent et adopter une stratégie intégrée qui se base sur l’obligation des mesures barrières, tant qu’on n’a pas atteint l’immunité collective".
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