Société
UNESCO : voici l’impact des médias sociaux sur les filles
27/04/2024 - 17:17
Khaoula BenhaddouDepuis plusieurs années, les médias sociaux envahissent le quotidien des populations. Jeunes et moins jeunes sont accrochés à leurs téléphones et passent leurs journées sur des applications comme Facebook, Instagram et TikTok.
Certes ces plateformes peuvent être utiles pour les jeunes internautes, mais elles présentent également des risques importants tels que la violation de la vie privée, le manque de concentration en classe et le cyber harcèlement.
C’est ce qui ressort du dernier rapport mondial de suivi sur l'éducation (GEM) publié ce jeudi 25 avril par l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO).
Pour Anna D'Addio, analyste politique principale de l'équipe du rapport GEM, "Les filles sur les réseaux sociaux sont beaucoup plus exposées à différentes formes de harcèlement. La cyberintimidation est beaucoup plus fréquente chez les filles que chez les garçons…C'est quelque chose qui affecte leur bien-être, et leur bien-être est important pour l'apprentissage".
Médias sociaux et approche genre
"Les interactions sociales des enfants se jouent de plus en plus sur les réseaux sociaux. Mais trop souvent, les plateformes pilotées par des algorithmes amplifient l'exposition aux normes de genre négatives. Des considérations éthiques doivent être prises en compte dans la conception de ces plateformes. Les réseaux sociaux ne doivent pas confiner les femmes et les filles à des rôles qui limitent leurs aspirations scolaires et professionnelles" explique Audrey Azoulay Directrice générale de l'UNESCO dans un communiqué de presse diffusé à l’occasion de la publication du rapport intitulé Technology on Her Terms.
Présenté à l’occasion de la Journée internationale des filles dans les TIC (technologies de l'information et de la communication), ce rapport pointe du doigt "les contenus générés par les algorithmes et basés sur l’image, notamment sur les réseaux sociaux, qui exposent les filles à des contenus à caractère sexuel ou faisant la promotion de comportements malsains ou de standards de beauté irréalistes. Cette exposition peut avoir des effets néfastes sur l'estime de soi et la perception du corps et se répercuter sur la santé mentale et le bien-être des filles, pourtant essentiels à leur réussite scolaire".
Le même rapport indique que les adolescentes seraient deux fois plus susceptibles de se sentir seules que les garçons et de souffrir d'un trouble de l'alimentation.
En se basant sur des recherches menées par Facebook, le rapport précise que 32% des adolescentes se sentent moins bien dans leur corps après avoir consommé le contenu de la plateforme Instagram.
Le rapport ajoute que "la conception même de TikTok rend l’application addictive par le biais de vidéos courtes et captivantes. Ce modèle de gratification instantanée peut avoir un impact sur la concentration et les habitudes d’apprentissage en rendant plus difficile la concentration dans le cadre des études ou des activités extra-scolaires".
Toujours selon les mêmes données, les filles souffrent davantage que les garçons de cyber harcèlement "En moyenne, dans les pays de l'OCDE disposant de données sur le sujet, 12 % des filles de moins de 15 ans, contre 8 % des garçons, ont déclaré avoir été victimes de cyber harcèlement". Et de préciser "Cette situation s’aggrave avec la prolifération de contenus à caractère sexuel basés sur l'image, de "deepfakes" (photos ou vidéos falsifiées) générés par l'intelligence artificielle et d'images à caractère sexuel auto-générées circulant en ligne et dans les salles de classe. Dans plusieurs pays analysés pour le rapport, des étudiantes ont déclaré avoir été exposées à des images ou vidéos à leur insu."
Ce contenu inadapté qui envahit les médias sociaux n’est pas sans danger sur la santé physique et psychique des jeunes filles comme l’explique Anna D'Addio, analyste politique principale de l'équipe du rapport GEM "De plus en plus de preuves montrent qu'une exposition accrue aux médias sociaux est liée à des problèmes de santé mentale, des troubles de l'alimentation et de nombreux autres problèmes qui conditionnent et détournent les utilisateurs des médias sociaux, et en particulier les filles, de l'éducation, ce qui affecte leur réussite scolaire ».
Impact sur le parcours éducatif des filles
Sous l’emprise des réseaux sociaux, les filles sont souvent détournées de leurs études "les filles sont confrontées à des stéréotypes de genre négatifs, amplifiés par les réseaux sociaux, qui les détournent de l'étude des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques (STEM), disciplines considérées comme étant réservées aux hommes, les privant ainsi de la possibilité de contribuer à la conception des outils qui génèrent ces stéréotypes" précise le rapport tout en soulignant que "les préjugés persistants dissuadent les femmes de poursuivre des carrières dans les STEM, ce qui se traduit par une absence de femmes dans le monde de la technologie".
A en croire le rapport "les femmes ne représentent que 35% des diplômés en STEM dans l’enseignement supérieur, un chiffre qui n'a pas évolué au cours des 10 dernières années". Et d’ajouter "Les femmes occupent moins de 25 % des postes dans les domaines des sciences, de l'ingénierie, des technologies de l'information et de la communication. Elles ne représentent que 26 % des effectifs dans les disciplines liées aux données et à l'intelligence artificielle, 15 % dans l'ingénierie et 12 % dans le domaine du « cloud computing » au sein des principales économies mondiales. Seules 17 % des demandes de brevet sont déposées par des femmes à l'échelle mondiale".
Sans grande surprise, la transformation numérique est principalement menée, selon le rapport, par les hommes. Bien que 68 % des pays aient mis en œuvre des politiques soutenant l'éducation dans les disciplines des STEM, seulement la moitié de ces politiques soutiennent spécifiquement les filles et les femmes.
Conscient de cela, le rapport appelle à investir davantage dans l’éducation et d’une réglementation plus intelligente des plateformes numériques "l'UNESCO s'efforce constamment de remédier à l'exclusion persistante des filles en matière d'accès à l'éducation et de réussite en plaidant pour des politiques qui rendent le système éducatif plus inclusif …en promouvant des lois et des réglementations qui garantissent un accès égal à l'éducation pour les filles et les protègent de la discrimination" conclut Anna D'Addio.
Au Maroc, une récente étude réalisée par le Centre marocain pour la citoyenneté (CMC) a souligné que les femmes sont les premières victimes du harcèlement sur les réseaux sociaux. Ainsi, une femme sur trois confirme avoir subi un harcèlement sexuel (31,2% pour les femmes contre 4,3% pour les hommes).
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