Technologie
Usine de lithium au Maroc, ce qu'il faut pour le succès du projet selon Rachid Yazami
26/07/2022 - 20:30
Mohammed Fizazi | Abderrahim SmougniL'annonce a été faite par le ministre de l'Industrie et du Commerce, Ryad Mezzour, le Maroc pourrait se doter d’une usine de fabrication de lithium, et des négociations seraient en cours à ce propos, mais aucun détail au sujet du nom du fabricant, ni sur l’état d’avancement des négociation n’a été dévoilé. Dans des propos recueillis par SNRTnews Rachid Yazami, physico-chimiste marocain et l'inventeur de l'anode graphite pour les batteries lithium-ion, et l’un des premiers à avoir appelé à l’ouverture d’une usine de lithium au Maroc a déclaré que les détails du projet sont encore méconnues.
“C'est une bonne nouvelle, je savais qu'il y avait des contacts avec plusieurs fabricants internationaux, mais je n'avais pas les détails. J'ai vu ce qui a été rapporté par les médias au sujet du ministre de l'Industrie et du Commerce, Ryad Mezzour. C'est un précédent pour un membre du gouvernement de parler publiquement de la question, mais sa déclaration n'a pas satisfait ma curiosité, et je me pose toujours beaucoup de questions”, a-t-il déclaré. et d’ajouter : “rien n’est encore officiel, il faut attendre l'annonce officielle ou la signature, mais il est fort probable que le fabricant en question soit chinois”.
Le scientifique souligne, par ailleurs, que le Maroc doit s’assurer de choisir un fabricant fiable et expérimenté dans le domaine et dont les batteries répondent aux exigences de sécurité requises. “La sécurité signifie préserver des vies, et le problème d'une batterie de voiture, contrairement à une batterie de téléphone, et que si elle n’est pas sûre, elle peut faire des victimes, en cas d'explosion ou d'incendie, et en tant qu'expert, je souligne que la sécurité est l’élément le plus important pour toute batterie au lithium” a-t-il confié.
La sécurité de la batterie implique également sa capacité à supporter les conditions climatiques et les températures extrêmes. Les batteries utilisées aujourd'hui sont conçues pour supporter des températures allant de moins 20 à plus 50 degrés, indique Yazami, soulignant que dans le cas du Maroc on n'atteint pas les moins 20 degrés, alors que la recherche scientifique est en course contre la montre pour inventer une batterie plus résistante à la température.
Toujours en ce qui concerne le Maroc, le scientifique estime que si on veut fabriquer une batterie marocaine, il faut aussi que ce soit un produit qui tienne compte des particularités du pays. “Une batterie intégrée à une voiture qui roule dans des villes comme Fès ou Marrakech en été, doit pouvoir supporter une chaleur de cinquante degrés” a-t-il lancé. Ajoutant : “C'est ce sur quoi je travaille avec la NASA: fabriquer des batteries au lithium, capables de résister à des températures allant de plus 10 à plus 80 degrés, un projet ciblant les marchés des pays qui connaissent des températures élevées”.
Rachid Yazami a évoqué également l’importance de la longévité de la batterie, soulignant qu’il s’agit d’un élément important pour que les batteries marocaines soient compétitives dans le marché, et qu'elles soient exportées vers l’Europe et l’Amérique. Le prix d’une batterie au lithium équivaut au tiers de la valeur de la voiture, ainsi, une batterie qui change tous les deux ans n’est pas une batterie de qualité, signale-t-il. “Une batterie de qualité doit tenir plus de 10 ans”, estime-t-il.
Ainsi, pour fabriquer des batteries de qualité, le fabricant doit obligatoirement être fiable, ajoute Yazami, qui a exprimé son inquiétude de voir le Maroc signé avec un fabricant de mauvaise qualité. “Etant donné que je vis en Asie et que j'ai des relations avec des fabricants en Chine, au Japon, en Inde et en Corée, je sais quelles entreprises ont une bonne réputation. Je crains donc que le Maroc traite dans ce domaine avec une entreprise qui n'a pas une bonne réputation”, a-t-il exprimé.
Au niveau des matières premières, notre interlocuteur indique que le Maroc dispose des compétences nécessaires, soulignant que parler d'une immense usine, signifie mettre en place une chaîne de production interconnectée et coordonnée. “Nous devons développer des entreprises marocaines qui convertiront le cobalt en NMC et les phosphates en LFP”, a-t-il déclaré, ajoutant: “quant au lithium, nous devons tisser des liens étroits avec le Chili, qui possède les plus grandes réserves au monde, ainsi que la Chine, qui est la première au monde en termes de gisements de graphite”.
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