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Barnier sous pression à deux jours de sa déclaration de politique générale
29/09/2024 - 20:19
AFP
Le Premier ministre Michel Barnier ouvre mardi les travaux du Parlement avec sa déclaration de politique générale, attendu au tournant par les partis du "socle commun" qui soutiennent son fragile exécutif, observé de près par le RN, et sous la pression de la rue.
Peu de choses ont filtré depuis la nomination de Michel Barnier le 5 septembre sur les lignes directrices qu'il entend donner à sa politique.
Tout au plus M. Barnier a-t-il confirmé vendredi dans une interview vouloir augmenter certains impôts, face à une situation budgétaire plus dégradée qu'escompté, en ciblant "ceux qui peuvent contribuer à cet effort" et en préservant "ceux qui sont sur le terrain, qui travaillent, qui produisent".
Selon des informations du Monde dimanche, le gouvernement envisagerait notamment d'augmenter de 8,5 points le taux de l'impôt sur les sociétés pour les entreprises réalisant au moins un milliard de chiffre d'affaires, une taxe sur les rachats d'action, un alourdissement de la fiscalité sur les véhicules les plus émetteurs de C02 et de celle des meublés. Matignon n'a pas souhaité commenté, pas davantage que Bercy, qui a souligné que "les derniers arbitrages sont encore à rendre".
L'ancien ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, qui avait déjà sonné l'alarme sur la question fiscale il y a une dizaine de jours, est de nouveau monté au créneau dimanche, à l'occasion de sa rentrée politique dans son fief de Tourcoing (Nord).
"Je sais que nous serons nombreux à ne pas pouvoir soutenir un gouvernement qui augmenterait les impôts: cela serait contraire à tout ce que nous avons fait de positif pour les Français", a-t-il mis en garde.
Vingt-sept députés du groupe Ensemble pour la République (ex-Renaissance) avaient déjà fait paraître dans La Tribune dimanche un texte appelant à la stabilité fiscale et à poursuivre les réformes en faveur du plein-emploi, telle que la réforme de l'assurance-chômage.
"Survie de notre démocratie"
Sur le flanc gauche du camp présidentiel, le MoDem a de son côté poussé les feux sur une revendication ancienne, l'instauration de la proportionnelle aux législatives. Le MoDem n'acceptera "pas le renoncement annoncé" sur cette question, qui regarde la "survie de notre démocratie", a souligné le président du groupe des députés centristes, Marc Fesneau, lors de l'université de rentrée du mouvement à Guidel (Morbihan).
Mardi, la pression sur Michel Barnier s'exprimera aussi dans la rue, avec des manifestations dans toute la France pour demander l'abrogation de la réforme des retraites et l'augmentation des salaires, à l'appel de plusieurs syndicats.
Après sa déclaration de politique générale mardi, M. Barnier devrait très vite affronter une motion de censure de la gauche.
Si le RN a confirmé dimanche par la voix du député Sébastien Chenu qu'il ne la voterait pas, lui aussi fait valoir un certain nombre d'exigences. "Il faut arrêter" d'augmenter la contribution de la France à l'Union européenne, a par exemple exigé M. Chenu sur RTL.
Marine Le Pen est d'autant plus encline à temporiser, qu'elle-même sera accaparée par son procès dans l'affaire des assistants parlementaires du Rassemblement national au Parlement européen, qui s'ouvre lundi jusqu'au 27 novembre.
"Un long chemin"?
En déplacement samedi à Mâcon (Saône-et-Loire), le chef du gouvernement s'était montré conscient de la fragilité de son gouvernement.
"Je suis là depuis 20 jours, je ne sais pas pour combien de temps", compte tenu "de la situation (...) inédite à l'Assemblée nationale", avec un hémicycle divisé en trois blocs loin de la majorité absolue, avait-il reconnu.
"Mais je suis là comme quelqu'un qui engage un long chemin (...) avec beaucoup de détermination", avait-il déclaré.
Le gouvernement va devoir s'atteler au plus vite à la difficile tâche de faire adopter avant le 31 décembre par le Parlement les budgets de l'Etat et de la Sécurité sociale.
La plupart des acteurs politiques s'attendent à ce que l'exécutif doive, comme l'an dernier, en passer par dix 49.3 (cette disposition de la Constitution qui permet de faire adopter un texte sans vote), qui seront autant d'occasions de censure.
Parmi les chausse-trapes à éviter, la question de l'Aide médicale d'Etat (AME), dont la suppression est de longue date une demande de la droite, contre l'avis d'une grande partie des macronistes.
Hormis ces lois budgétaires, les parlementaires se demandent bien sur quels textes ils vont pouvoir travailler, compte tenu de la difficulté à faire émerger des majorités au Palais Bourbon.
Le risque est "que ça vivote mais que ça ne produise rien", se désole une ancienne ministre, qui ne voit "rien" à l'agenda de l'Assemblée en octobre, si ce n'est le 31 la "niche" réservée aux textes du RN, et peut-être des propositions de loi transpartisanes.

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