Economie
Quels impacts climatiques sur les banques marocaines?
17/04/2024 - 14:36
Aya LankaouiPour aborder ces enjeux, la Banque Mondiale (BM) et Bank Al-Maghrib (BAM) ont récemment publié un rapport sur l'impact des risques climatiques sur le secteur bancaire marocain.
Ces chocs climatiques présentent des risques non seulement pour la population, les infrastructures et l'économie, mais aussi pour la stabilité et la solidité du secteur bancaire marocain, qui est considéré comme un moteur essentiel de la croissance économique avec des actifs équivalant à 138% du PIB.
En utilisant divers modèles climatiques et macrofinanciers, un test de résistance aux risques climatiques a été réalisé pour quantifier les effets des sécheresses et des inondations induites par le climat sur l'économie et le secteur bancaire marocain, ainsi que pour évaluer l'impact d'une transition énergétique sur les expositions au crédit. En particulier, il s'agit de l'une des premières analyses visant à évaluer l'exposition du secteur financier aux risques de sécheresse induits par le changement climatique.
Le rapport souligne que le changement climatique pourrait considérablement aggraver les dommages financiers causés par les sécheresses et les inondations au Maroc, ce qui aurait des répercussions notables sur les pertes bancaires en cas de sécheresse.
Les incidences économiques de différents scénarios de sécheresse se situent entre 4,2 milliards de dollars (séquence historique de 1 sur 500 ans) et 7 milliards de dollars (scénario de changement climatique grave), ce qui réduirait le PIB de 1,8 à 3,5 points de pourcentage, tout en diminuant le taux d'adéquation des fonds propres des banques de 1,3 à 2,2%.
L'analyse met en évidence les effets importants du changement climatique dans tous les scénarios. Les inondations pourraient entraîner des dommages se situant entre 8 milliards d'euros (inondation historique de 1 sur 500 ans) et 10,5 milliards d'euros, réduisant le PIB de 1,6 à 2,2%.
Cependant, contrairement à la nature prolongée des sécheresses, les inondations sont de courte durée, ce qui se traduit par des incidences plus faibles sur les pertes de prêts et les capitaux bancaires.
Le rapport met en lumière les risques de transition liés aux changements politiques et à l'augmentation des émissions de gaz à effet de serre, malgré la faible part mondiale des émissions du Maroc (0,16%). Les émissions au Maroc augmentent, ce qui pourrait accroître les risques de transition pour les secteurs à forte intensité de carbone tels que la production d'électricité, les transports, l'exploitation minière, l'agriculture, l'industrie manufacturière et les services publics.
Le rapport constate également que 24,3% des prêts totaux et 43,6% des prêts aux entreprises non financières sont exposés à des industries sensibles à la transition, une proportion relativement élevée par rapport à d'autres pays. Une évaluation de la vulnérabilité montre qu'une taxe carbone de 75 euros/tCO2 pourrait augmenter le risque de crédit pour 8,4% des prêts aux entreprises, ce qui équivaut à 3,1% des actifs du secteur bancaire.
La Banque Mondiale indique dans ce rapport que l’impact du changement climatique sur le secteur bancaire peut être sous-estimé en raison des défis liés à la modélisation des points de basculement du climat et à l'interaction entre les incidences macroéconomiques, financières et climatiques.
Les limitations des données et les différentes approches de modélisation pourraient affecter l'exactitude de l'évaluation, la rendant exploratoire et sujette à des mises à jour à mesure que la compréhension des risques climatiques s'améliore.
Le rapport souligne que, bien que les incidences globales du climat sur le secteur bancaire soient gérables, l'impact financier varie d'une banque à l'autre, ce qui nécessite une attention de la part des institutions financières et de Bank Al-Maghrib.
De plus, les incidences des risques physiques et de transition varient considérablement d'une institution à l'autre, en fonction de la concentration géographique et sectorielle des portefeuilles de prêts. Le rapport souligne la nécessité pour les banques marocaines d'intégrer les risques climatiques dans leurs dispositifs de gestion des risques et de gouvernance.
La Banque Mondiale indique qu'elle continuera de collaborer avec Bank Al-Maghrib, d'autres régulateurs nationaux et des partenaires internationaux tels que le Conseil de stabilité financière et le réseau pour l'écologisation du système financier pour améliorer les méthodes d'évaluation et intégrer les risques climatiques dans les approches de surveillance afin d'améliorer la résilience des secteurs financiers face aux chocs climatiques.
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