Société
Les musulmans sont-ils les seuls à jeûner ?
05/04/2022 - 15:00
Aïcha DebouzaNées au Moyen-Orient, dans des paysages de sable et de soleil, les trois grandes religions monothéistes ont inscrit la pratique ancestrale du jeûne dans leur calendrier. Ramadan, Carême ou encore Yom Kippour, la durée varie, les modalités ont évolué au fil des siècles, mais pour toutes, le temps de la diète est l’occasion de se recentrer sur le spirituel et de s’ouvrir au partage. C’est en quelque sorte, une manière nouvelle de voir les choses. Mais se priver de nourriture sur une période plus ou moins longue n’appartient pas uniquement aux trois religions monothéistes.
"Le jeûne est immémorial. L’homme religieux et probablement l’homme malade aussi a toujours jeûné, à la fois pour des raisons de bien-être spirituel et physique. On sait que certains Grecs pratiquaient déjà un jeûne médical. En Inde, deux millénaires avant Jésus, le jeûne était au fondement des rites védiques", raconte dans son ouvrage, Jean-Claude Noyé, auteur du Grand Livre du Jeûne.
En effet, en Inde, deux millénaires avant Jésus, le jeûne était au fondement des rites védiques. Ainsi, il en est déjà fait mention dans le Mahâbhârata, une épopée sanskrite, rédigée plusieurs siècles avant Jésus. Les bienfaits du jeûne étaient donc bien identifiés, que ce soit pour des raisons médicales ou philosophiques. "Quand on jeûne, ce n'est pas le corps qui a faim c'est l'âme", disait le docteur Buchinger, celui qui a introduit le jeûne thérapeutique en Europe occidentale.
Au fil du temps, au Ve siècle avant Jésus, dans la Grèce antique, les vertus du jeûne étaient également reconnues et fréquemment mises en application. À l’époque, le jeûne faisait partie des rituels organisés lors des grandes fêtes religieuses. Pendant les Thesmophories par exemple, organisées dans la ville d’Éleusis en l’honneur de Déméter, déesse de l’agriculture, les Athéniens s’abstenaient de manger pendant une journée complète2.
À Rome par exemple, le jeûne pouvait également être associé à la religion. Cérès, l’équivalent latinisé de Déméter, était célébrée lors des Cerealia ou Jeux de Cérès. Pour l’occasion, les Romains observaient le Jejunium Cereris, une privation de nourriture associée aux célébrations. Dans certains monastères crétois, les prêtres ne mangeaient rien de cuit durant toute leur vie. Cet engagement s’apparente à une autre forme de jeûne lié à des pratiques religieuses.
Qu’est-ce que le jeûne chrétien ?
Dans la religion chrétienne, le jeûne fait référence aux quarante jours et quarante nuits de privation de nourriture de Moïse à travers le désert. Dans la Bible, il est dit aussi que Jésus expérimente l’abstinence pendant quarante jours, juste après son baptême. Ce dernier, en plein désert, avait mené un combat spirituel dont il est sorti victorieux. Si le jeûne complet n’est que rarement pratiqué, les chrétiens observent ce qu’on appelle les "jours maigres" lors du carême. Cela consiste à se priver de viande jusqu’à la veille de Pâques, en opposition aux "jours gras".
D’une durée de quarante jours, le carême commence le mercredi des Cendres et prend fin le Jeudi saint au matin, avant la célébration de la Cène du Seigneur. La Semaine Sainte, qui commence avec le dimanche des Rameaux afin de commémorer la Cène, la Passion et la mort du Christ sur la Croix. Du Samedi Saint au soir et du dimanche de Pâques, les chrétiens célèbrent la résurrection du Christ.
Les juifs, pourquoi jeûnent-ils aussi ?
Dans le judaïsme, le jeûne, aussi connu sous le nom de taanit, est pratiqué de façon très ponctuelle. Il est recommandé par la Torah pendant les jours de Yom Kippour, Tisha Beav, le jeûne d’Esther ou encore le jeûne des premiers-nés5. La plupart des jours d’abstinence de la religion juive font référence à des commémorations ou à des périodes de deuil.
De ce fait, un jeûne chez les juifs signifie une abstention complète de nourriture et de boissons, eau comprise. La prise de médicaments, voire le brossage de dents sont interdits lors des deux jeûnes majeurs, c'est-à-dire Yom Kippour et Tisha Beav, mais sont permis lors des jeûnes mineurs. On peut d’ailleurs diviser les jeûnes du calendrier d’Israël en quatre catégories. Il s’agit de Kippour (jeûne de la Torah), des jeûnes liés à la destruction de Jérusalem à l’exil (3 tichri, 10 tévet, 17 tamouz, 9 av), le jeûne d’Ester (souvenir de la sortie d’Égypte) ainsi que des jeûnes privés (évènement familial ou personnel).
Par ailleurs, cette pratique ancestrale revient de plus en plus ces derniers temps jusqu’à devenir une mode. Jeûne complet ou intermittent, ladite pratique s’avère pour nombre de personnes, une manière efficace pour maigrir et guérir certaines maladies. Bien plus que cela. Il y a quelques années on parle même de jeûne thérapeutique, très courant en Allemagne ou en Russie.
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