Société
Marocains bloqués en Syrie et en Irak, les révélations de la Mission exploratoire
16/07/2021 - 16:17
Lina IbrizCe vendredi 16 juillet, le rapport de la Mission exploratoire temporaire sur les Marocains bloqués dans certains foyers de tension comme la Syrie et l’Irak a été présenté devant la Commission des affaires étrangères, de la défense nationale, des affaires islamiques et des MRE de la Chambre des représentants. Cette mission, présidée par le député Abdellatif Ouahbi et qui est composée de 13 membres, avait comme objectif principal de mettre la lumière sur les conditions dans lesquelles se trouvent les marocains bloqués en Syrie et en Irak, notamment les conditions des femmes et des enfants vivant dans des camps au Nord de la Syrie. Il leur a fallu près de 60 jours pour atteindre une compréhension globale et profonde de ce dossier qui concerne quelques 1.654 combattants marocains ayant rejoint les rangs des groupes terroristes, et auxquels se sont ajoutées 640 familles. La Mission s’est également appuyée sur une approche multidimensionnelle et une méthodologie de travail diversifiée portant sur des études comparées, une méthodologie du cumul en se basant sur des expériences précédentes, une analyse des données recueillies par le ministère de l’Intérieur, des rencontres avec des ministres, les autorités compétentes, les familles des citoyens bloqués en Syrie et en Irak ainsi qu’avec des ex-revenants.
Un plan d’action multi-niveaux est nécessaire
Dans ce cadre, la Mission a défini, dans un premier temps, quatre cas de figures représentant les catégories principales des femmes et des enfants bloqués en Syrie et en Irak. Il s’agit d’abord des enfants ayant voyagé avec leurs parents qui sont décédés, ou l’un d’eux est décédé, et qui se sont retrouvés bloqués dans les foyers de tension. Ensuite, des enfants qui ont voyagé avec leur père marocain ou à double nationalité alors que la mère marocaine est restée soit au Maroc soit dans le pays étranger. S’y ajoutent les enfants qui sont partis aux foyers de tension avec leur mère, abandonnant ainsi les pères qui réclament que leurs enfants retournent chez eux, ainsi que ceux qui sont nés en Syrie d’un père marocain ou une mère marocaine, alors que l’époux ou l’épouse sont d’une nationalité étrangère.
Par ailleurs, ce rapport a identifié les facteurs contribuant au phénomène des combattants terroristes étrangers. Ils sont d’ordre social, économique, psychique, idéologique et logistique. Il considère aussi que les médias ont à leur tour contribué au phénomène à travers les images diffusées de la guerre syrienne et qu’il existe trois principaux défis qui entravent les efforts fournis dans ce cadre. Selon la Mission, ils sont premièrement d’ordre géopolitique vu que Daech contrôle toujours certaines régions en Syrie et en Irak, deuxièmement, d’ordre continental avec les mouvances des groupes terroristes et leur relocalisation en Afrique, et troisièmement d’ordre idéologiques, car l’idéologie terroriste reste très présente soit au niveau des réseaux sociaux ou des discours. Sur le registre de traitement de cette problématique, le rapport insiste sur la nécessite d’un plan d’action multi-niveaux. Le premier niveau étant l’accompagnement des femmes et des enfants et leur réhabilitation psychique et émotionnelle, le deuxième consiste à mener des études sur les méthodes de traitement avec les survivants de la guerre en mobilisant les centres de recherches universitaires, alors que le troisième niveau se basera sur l’expérience riche du Maroc en matière de lutte contre les idéologies extrémistes et terroristes. Un quatrième niveau devrait viser les enfants à travers les contenus et programmes éducatifs.
Les recommandations
En fin des travaux, la Mission a décidé de limiter ses recommandations aux enfants et aux femmes, de ramener les enfants accompagnés de leurs familles, notamment leurs mères qui n’ont pas participé aux combats, d’adopter une approche sécuritaire et judiciaire quant aux combattants en les considérant comme étant impliqués dans des activités terroristes, et de faire le suivi des efforts gouvernementaux en matière de réhabilitation et de réinsertion de tous les enfants revenant des foyers de tension en Syrie et en Irak. Elle a d’ailleurs recommandé de créer "une institution nationale pour traiter de ce dossier, en coordination avec le gouvernement et la société civile active sur le terrain". Pour ce faire, elle a également appelé à la mise en place d’un cadre législatif permettant d’identifier les mesures et les procédures à suivre pour traiter le dossier des combattants marocains en Syrie et en Irak, ainsi que celui des femmes et des enfants bloqués là-bas, l’objectif premier étant de "faciliter leur retour rapide et leur intégration dans des conditions saines et un environnement familial et social".
Elle estime aussi que sur le long terme, les efforts internationaux doivent se poursuivre afin de trouver une solution radicale et définitive pour éradiquer l’idéologie terroriste et extrémiste.
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